Ils sont trois à diriger la liste Euskal Herrian Vert et Solidaire et visiblement, ce fonctionnement ne pose pas le moindre problème.
Lorsqu’on demande à Lysiann Brao, Brice Morin et Mathieu Accoh à partir de quel score ils feront la fête le 15 mars au soir, le trio éclate de rire : « On fera la fête quoiqu’il arrive ». Dans leur permanence de l’avenue du président Kennedy, les trois militants, bien que venus d’horizons politiques assez éloignés, ont visiblement trouvé une façon de réfléchir ensemble harmonieuse. Pour Bisque, Bisque, Basque ! ils ont accepté de répondre sans détours à toutes les questions.
– On a le sentiment que votre liste a un peu patiné au départ, a eu du mal à trouver ses marques. C’est exact ?
– Brice Morin : C’est tout simplement parce que nous n’avons pas procédé comme les autres et que l’élaboration du programme nous a paru essentielle avant d’annoncer des noms. Ensuite, il a été compliqué de faire travailler ensemble des groupes déjà constituées et des personnes isolées.
– Mathieu Accoh : Je suis engagé en politique depuis 2005 à cause du déni de démocratie dont les Français ont été victimes au moment du référendum pour le Traité Constitutionnel Européen. Cette question est fondamentale pour moi. On peut ne pas être d’accord mais la volonté populaire, une fois qu’elle s’est exprimée, doit être entendue et suivie. En tant que militant du Parti de Gauche, puis du Front de gauche et de la France Insoumise, je suis confronté à la crise de la représentation et je cherche un outil politique qui me permette de faire avancer mes idées. Soutenir un mouvement citoyen comme l’association Biarritz Euskal herrian paraissait la meilleure démarche. Pour nous, cette rencontre est un événement politique à plusieurs niveaux. D’abord parce que cela fait bouger les lignes entre jacobinisme et culture locale. Ensuite parce que de nombreux symptômes de notre monde malade trouvent une solution évidente à l’échelle locale. Pour ne prendre qu’un exemple l’eusko, monnaie locale basque, est une solution à la fraude ou l’évasion fiscale, cela participe à la relocalisation de l’économie et donc aux circuits courts et donc à l’écologie.
– Vous diriez que votre trio fonctionne bien ?
– Lysiann Brao : C’est une évidence. Le fonctionnement à trois va nous protéger d’un fonctionnement vertical et il évite les conflits d’ego. C’est une immense responsabilité de porter officiellement les valeurs de l’écologie, d’avoir à construire une ville qui protège les plus démunis à un moment où notre système de protection est violemment attaqué. De plus nous sommes à un moment où Biarritz risque de devenir une ville hors-sol, terrain de jeu des touristes et des spéculateurs. Il fallait être au moins trois pour porter une telle responsabilité ! Pour les élections municipales de 2014, j’ai été sollicitée pour travailler sur les questions autour de la jeunesse par l’association Biarritz Autrement pour proposer des actions pour faire revenir des jeunes à Biarritz. L’association a choisi de partir avec Michel Veunac au 1er tour et j’ai donc intégré cette liste. La manière dont se sont passés les évènements, m’a fait me dire que plus jamais je ne repartirai dans un tel contexte politique, vertical et déconnecté
« Croire en l’intelligence collective »
– Parmi les élus abertzale de la précédente mandature, vous n’avez retenu que Maialen Etcheverry. Pourquoi elle et pas Régine Daguerre ou Peio Claverie ?
– Brice Morin : Parce que Maialen est la seule qui est restée en contact avec nous. Elle voulait démissionner compte tenu des soubresauts qui agitaient la majorité. C’est nous qui lui avons demandé de rester, de défendre nos idées, ce qu’elle a fait avec beaucoup de conviction même si la situation était très difficile pour elle. Quant aux autres élus que vous citez, ils ont disparu de la circulation et nous n’avons plus eu la moindre nouvelle d’eux après leur élection. Grâce à Maialen Etcheverry, nous avons une partie des clés du fonctionnement de la mairie et nous pourrons aller plus vite lorsque nous serons en position de gouverner.
– Matthieu Accoh : Ce mandat de Veunac a été catastrophique. Je me suis engagé avec enthousiasme dans les conseils de quartiers dont j’ai été l’un des présidents (Bibi-Beaurivage, Milady Colline). On a vite vu les limites dues, non pas au dispositif ou à la volonté des participants mais aux freins qui résidaient entièrement dans le refus du maire d’appliquer la charte qu’il avait lui-même écrite ! Hervé Boissier a fait un très bon travail pour promouvoir la démocratie participative mais le problème, c’est que Veunac n’en voulait pas. Je crois encore plus qu’avant à l’intelligence collective et notre projet de démocratie participative a tiré le meilleur des expériences d’autres villes.
– Lysiann Brao : La participation, c’est la capacité à être agile, à adapter sa façon de gouverner à la demande des citoyens.
– Quelle est la mesure phare de votre programme ?
– Brice Morin : il n’y a pas une mesure phare mais toute une série pour remettre les Biarrots au centre des préoccupations municipales. La démocratie participative sera évidemment omniprésente dans toutes les décisions que nous prendrons. Nous avons prévu de faire des conseils extra-municipaux pour toutes les décisions importantes à prendre et un conseil municipal de la jeunesse pour responsabiliser très vite les jeunes Biarrots.
– Lysiann Brao : Nous consacrerons beaucoup de soin au logement pour permettre aux jeunes Biarrots de rester dans leur ville. La situation actuelle est inacceptable. Nous appliquerons une surtaxe maximale de 60% aux résidences secondaires. Bidart et Guéthary ont pris cette décision avant nous et pourtant les chars russes ne sont pas à nos portes !
– Matthieu Accoh : Et bien évidemment la transition écologique nous préoccupe beaucoup et nous prendrons des mesures radicales pour préserver le futur comme la signature d’un contrat avec un fournisseur d’électricité 100% renouvelable ou la relance au phare d’un projet d’énergie houlomotrice. Mais l’enjeu de cette élection c’est de savoir si l’écologie n’est ni de droite ni de gauche ou bien si au contraire c’est le système libéral qui a pour objectif de vendre tout, partout et dans la plus grande quantité qui est la cause des problèmes. Vous aurez compris que nous dénonçons l’illusion du capitalisme vert et du greenwashing portés par de nombreux candidats.
« Le pouvoir de l’argent a demandé aux élus de se soumettre »
– J’imagine que vous avez suivi avec attention le conseil municipal du 12 février dernier et les débats autour du Biarritz Olympique…
– Brice Morin : Ce débat a ouvert les yeux à tout le monde. Un club professionnel ne peut pas affirmer de cette façon ses demandes. C’est un signal fort que le pouvoir de l’argent a voulu envoyer en demandant aux élus de se soumettre. Bien évidemment, nous ne l’accepterons pas.
– Avez-vous déjà pris une décision sur ce que vous allez faire au soir du premier tour ?
– Lysiann Brao : Nous avons pris une décision de fonctionnement. Il faudra qu’une proposition obtienne l’approbation des deux tiers de la liste pour qu’elle soit adoptée et, si nous dépassons les 10% de suffrages obtenus, nous devrons décider si nous nous maintenons pour faire une opposition constructive ou si nous rejoignons une autre liste.
– Est qu’il y a des listes avec lesquelles vous ne vous allierez jamais ?
– Les trois, unanimes : Arostéguy, Saint-Cricq, Veunac, ce n’est pas pour nous !
Quand on vous disait que cette liste ne manque pas de caractère et ne louvoie pas pour dire ce qu’elle pense.
Pour lire le programme en détail : https://www.biarritzvertetsolidaire.eus/fr/ehvs-biarritz/